B.1.4. Ma chaîne sur Facebook

 

 

Ma chaîne sur Facebook

 

 « Ma porte est toujours ouverte, le café est toujours prêt et mon four parfois chaud. Ma maison est un endroit de paix et sans jugement. Tous mes amis qui ont besoin de parler sont toujours les bienvenus. Ce n’est pas une bonne idée de souffrir en silence. J’ai du chocolat chaud, du café, du rhum de diverses origines… Vous serez toujours les bienvenus. C’est toujours bien de parler, mais encore mieux d’écouter ! Est-ce qu’au moins un de mes contacts peut copier et afficher ceci sur son mur (ne pas partager). J’essaie de prouver que quelqu’un, quelque part, est à l’écoute. »

J’ai déjà précisé que, si j’ai partagé ce qui précède sur Facebook, je ne faisais que répondre à une sollicitation de mon ami Yves Dufour. Et si je me suis exécuté, moi qui ne déteste pourtant rien d’autre que le principe de ces chaînes obligées sur les réseaux sociaux, c’est parce que, pour une fois, je me suis reconnu, je me suis identifié… jusque dans le « four parfois chaud ». Et là, il me faut vous conter cette anecdocte.

En face de ma maison de Pont-Croix vit une bande de personnes assez marginales. Elles ne font pas de bruit dans le village, mais n’y ont pourtant pas très bonne réputation. J’ai ouï dire que certaines auraient fait de la prison et que d’autres se livreraient à la culture de cannabis sous serre dans leur jardin entièrement clos. Venant d’emménager depuis peu, c’est pourtant à ces drôles que je suis allé proposer de venir prendre, un soir, un apéritif dinatoire chez moi. Soad se trouvant encore à Plaisir avec sa fille et ses petits-enfants, je me suis mis, pour le coup, aux fourneaux. J’ai acheté des friands et autres boustifailles chez le charcutier du bourg. J’avais dans mon bar de quoi soutenir un siège et j’attendais, vers 19 heures, mes invités tout en regardant un reportage sur Georges Brassens à la télé. Lorsqu’ils ont sonné à l’heure dite à ma porte, en allant leur ouvrir, j’ai vu une immense fumée se dégager de la cuisine. Tout à mon émission, j’avais simplement oublié les friands au four. Ceux-ci avaient cramé et étaient irrémédiablement perdus par conséquent. Le pire est qu’il m’a été impossible d’ouvrir le four, un Rosières de qualité, avant le lendemain. Lui aussi était définitivement fichu et il m’a fallu le remplacer.

Cet incident, qui aurait pu avoir de plus graves conséquences, ne nous a pas empêchés de passer une bonne soirée. Mes convives ont fait honneur à mes victuailles et ont éclusé, à trois, quatre bouteilles de bon bordeaux et une entière de lambig, le calva breton, en guise de digestif. A 23 heures, c’est moi qui ai été contraint de les mettre gentiment mais fermement à la porte, sinon je crois qu’ils auraient passé la nuit dans mon salon, tellement ils s’y sentaient bien.

Ma porte est donc toujours ouverte. Mais je sais aussi ne pas me laisser envahir. De mes voisins plus que  » spéciaux  » et dont la réputation n’était nullement surfaite (l’un a réellement fait de la prison pour homicide et un autre continue de dealer du shit dans le village), il n’en reste plus que deux que je croise de temps à autre. Nounours, celui qui figure en médaillon et dont je ne connaissais même pas le prénom, est mort en 2015 des longues suites de son infirmité (une jambe amputée suite à un accident de moto).

Dieu reconnaîtra les siens…

Plaisir, 13 février 2017